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Menhir de Colobrières
Cham des Bondons
Lozère
Photo Bruno Marc |
Sur la cham des Bondons les menhirs abondent. Ils poussent sur des tapis d’ample mousse, tels de majestueux phallus de pierre ou d’impudiques champignons minéraux, dressant vers le ciel leur arrogante silhouette verticale, brisant ainsi l’harmonie d’un monde horizontal. Ils sont semblables au poing dressé du révolutionnaire menaçant, ou du mécréant revendicatif qui défie ses propres dieux. Leurs masses droites alignées sur les sommets paraissent être des symboles d’éternité. Celles semées sur les pentes sont des victoires remportées sur les éléments, l’équilibre ou les lois de la physique.
On voit à travers ces blocs dressés bien des choses, et ce alors que la transparence n’est pas la vertu première du granite. Sont-ils des jalons géologiques censés suivre des lignes telluriques ? Sont-ils des balises délimitant des zones d’atterrissage terrestres pour de spacieux engins spatiaux, venus d’au delà de la voute céleste, ayant traversée la voie lactée et la constellation de la vache d’Aubrac pour vérifier si la terre était effectivement bleue comme une orange et si leurs occupants, les petits hommes verts, pouvaient envisager d’y voir la vie en rose. Sont-ils des repères de croyances solaires ou lunaires, déplacés on ne sait trop comment il y a 5000 ans par les indigènes d’alors, soucieux d’honorer leurs divinités mystérieuses et de se relier à leurs panthéons méconnus par ces cristallines émergences, appeaux du culte et voies des seigneurs pour émettre d’impénétrables secrets dans l’immensité du tabernacle du massif du Lozère. Sont-ils la version massive, centrale et brute des ziggourats d’Ur, des minarets d’or de la Koutoubia ou des tours d’argent de Sodome et Gomorrhe ? Sont-ils des montjoies érigés dans des temps plus récents pour guider les transhumances bovines, ovines ou celles d’humains avinés perdus le long de la lande ? Sont-ils des limites de territoires ? Sont-ce des quilles laissées sur place par la doublette Gargantua et Grandgousier, héros de Rabelais, après une partie d’un jeu qui, même à la lyonnaise, fut une suite d’incroyables tricheries quant à la distance autorisée par la fédération et celle pratiquée par les joueurs.
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Transhumance ovine à Fontpadelle - Lozère |
Avant de dire ce que sont réellement les menhirs, il faut revenir sur la signification de ce mot à la terminologie si peu occitane. Elle viendrait du breton « men » pour pierre et « hir » pour dressé donc, littéralement pierre dressée. Certes, mais cela peut venir aussi de menire, de l’anglo-saxon « man » pluriel « men » pour hommes et « ire » du latin ira pour courroux ou colère. On aurait donc à faire à des hommes en colère. Or, il se trouve que dans le hameau de Fontpadelle vivait (et vit toujours) une famille La Hire. Elle est issue de la lignée d’Etienne de Vignolles, compagnon de Jeanne d’Arc, plus connu sous le sobriquet de La Hire. Personnage coléreux, toujours en rogne car il ne pouvait amadouer son sot briquet à amadou qui ne fonctionnait jamais, et qu’il avait toujours grand mal à allumer le calumet qui lui servait d’amulette. Il n’eut pas d’enfant légitime mais plusieurs bâtards, dont l’un avec une anglaise séduite lors du siège d’Harfleur qu’il fit la fleur au tromblon et qu’il perdit. Si le siège d’Harfleur fut un échec, celui de l’anglaise fut vite assis et fructueux, emporté, vent debout, par la fougue de La Hire. Un rejeton naquit par ce siège. Il avait tant les traits de son géniteur que ce denier, malgré l’absence de lignage, lui donna son nom. C’est ce La Hire, Stéphane de son prénom, qui vint s’installer en Gévaudan, à Fontpadelle, vers 1470.
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Etienne de Vignolles dit La Hire
compagnon de Jehanne d'Arc
au siège d'Orléans en 1429
Enluminure de Loïc Sécheresse, XXe siècle |
Il avait hérité de son père le caractère ombrageux, irritable et colérique. De sa mère il tenait un accent britannique à couper au Laguiole. A cause de ce double héritage, les gens de Fontpadelle eurent tôt fait de remplacer son nom d’état civil par une appellation plus en adéquation avec son caractère. La Hire devint Man Hire puis Menhir, par une altération de prononciation due à l’accent auvergnat de la région. Ce pseudonyme restera à jamais accolé à sa famille, corroborant la deuxième hypothèse quant à l’origine du mot « menhir » dans la région. Menhir s’était établit à Fontpadelle riche de quelques pièces d’or lui venant de son père. Il put acheter plusieurs arpents de terre, d’où sortirait plus tard un serpent de mer. Situées sur les flancs du mont Lozère, ces terres étaient couvertes de blocs erratiques oubliés par les glaciers du dernier âge de glace. En 1700, ces hérétiques morènes contrariaient fort Armand « Menhir » descendant de Stéphane, dans ses projets d’agriculture. Il les enleva donc de ses parcelles et alla les déposer un peu partout dans le pourtour de sa propriété. L’entreprise était de taille vu les pierres ! Pour cela, il fit appel à son cousin, Philippe de La Hire (1640 – 1718), astronome et mathématicien et découvreur d’un mécanisme qui porte son nom : « la droite de La Hire ». Il s’agit d’un hypocycloïde à deux rebroussements, obtenue par roulement d'un cercle dans un cercle de rayon double, et qui se réduit à un vulgaire, mais utile, segment de droite. Grace à cet ingénieux stratagème, le déplacement des blocs de granite des sols d’Armand ne souleva pas de difficulté.
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Alignement de menhirs - Cham des Bondons, Lozère |
L’histoire aurait pu en rester la, sans mystère ou kabbale sur cette terre Gabale, si
les indépendantistes gabalitains ne s’en était pas mêlé. Si l’existence de cette tendance a été officialisée en 1976, de fait, le mouvement autonomiste existait depuis déjà des lustres. On peut raisonnablement penser que l’histoire de ce canidé qui ridiculisa longtemps le roi de France, ses dragons, ses chasseurs, ses lieutenant de louvèterie et autre sbires, et dont l’Europe entière se gaussa des tours joués à l’autorité royale, absolue et parisienne entre le 30 juin 1764 et le 19 juin 1767, fut la première action menée par la mouvance indépendantiste lozero-gabalitaine. Bien après ses aventures lupines, dans les années 1940, d’autres loups, bien moins sympathiques, beaucoup plus bipédiques, vert-de-gris et venant de Germanie, sont entrés dans Paris. Pire, ils sont aussi entrés en Gévaudan. Refusant déjà de vivre sous le joug liberticide et réducteur des occupants jacobins et parigots, les humeurs chauvines, nationalistes et éprises de libertés de nos soldats de l’autonomie ne pouvaient tolérer sur le sol sacré de la patrie, les bottes lourdes et oppressantes d’autres goths, ces teutons tétant les transes tribales d’une créature en fureur, moustachue et sournoise, qui rêvait de soumettre l’Europe entière à sa folie pour mille ans. Les combattants lozériens passèrent donc quelques années dans les maquis et participèrent activement au raccompagnement des aryens dans l’arène de leur Rhénanie natale.
A la fin du conflit, une question se posa : que faire des armes utilisées pendant la Résistance ? Le nouveau pouvoir installé à Paris prétendait toujours à sa souveraineté sur les cimes, les vallées et les causses gabales. La lutte finale était à venir, il fallait donc dissimuler l’arsenal. Et la, un combattant qui avait le nez creux, eut, au pied levé, la tête traversée par une idée géniale. Il proposa d’enterrer les armes sous les blocs de granite qui, quelques centaines d’années avant, avaient été disséminés de-ci delà. Eu égard à la disproportion entre le nombre d’armes à cacher, inférieur au nombre de rocs disponibles, comment ne pas se fourvoyer en cas de besoin, entre ceux sous lesquels dormaient les matériels de guerre et ceux qui n’abritaient que d’innocents lombrics. La solution était toute simple. Pour se rappeler sous quel bloc les armes étaient cachées, on laisserait le dit bloc debout. Costauds et nombreux, les vaillants lozériens vinrent facilement à bout de la non-erectibilité naturelle des roches.
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Redressement d'un menhir |
Ainsi naquit la légende des menhirs de la Cham des Bondons. Ils ne sont en fait que des sémaphores devant guider les corps-francs de la souveraineté lozérienne, au matin du grand soir de l’Armageddon parisien, vers leurs glaives vengeurs. Bien sur, on mesure la peine faite aux tenants de la théorie officielle, qui fait de la Cham des Bondons la deuxième concentration de menhirs en France après Carnac en Bretagne. On regrette la tristesse infligée aux archéologues et aux autochtones qui voient ainsi un pan de leur histoire s’effondrer, eux qui croyaient que leur patrimoine était glorieux des traces d’une civilisation brillante, qui, avant les pyramides d’Egypte, avait été capable de déplacer des masses considérables, de développer une cosmogonie cohérente et d’en laisser des traces qui feraient parler d’elle pendant encore des millénaires. L’Histoire est injuste.
Lozérix - Chant de pierre et pignon de champ
Notes :
Sur l’importance archéologique de la Cham des Bondons
Site
Mes Cévennes
Répertoire mégalithique de Bruno Marc
Sur la carrière de menhirs de Fontpadelle
Répertoire mégalithique de Bruno Marc
Sur la droite de La Hire
Site de Robert Ferréol
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Les Bretons, tout aussi pragmatiques que les Lozériens, ont leur propre explication sur les menhirs |
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