jeudi 5 septembre 2024

Un intellectuel délité





L'élite de ce pays permet de faire et défaire les modes, suivant la maxime qui proclame : "Je pense, donc tu suis".
Pierre Desproges, Fonds de tiroir

Dès que quelqu'un me parle d'élites, je sais que je me trouve en présence d'un crétin.
Emil Michel de Ciora, Cahiers 1957 - 1972

En France, si vous faites partie de l'élite intellectuelle et que vous toussez, on publie un article en première page du Monde
Noam Chomsy

 Il n'y a pas d'élite, hélas, c'est la qu'est l'os !
d'après la paronomase de La grande Vadrouille, Gérard Oury - 1966, dialogues de Georges et André Tabet


 Le leader de la France Insoumise s’est encore laissé aller à une saillie aussi injuste qu’outrecuidante contre la Lozère et les Lozériens (Université d'été LFI, Châteauneuf-sur-Isère, Drôme, 24 aout 2024). Avant de développer, remarquons le savoureux paradoxe entre le nom de cette formation politique, « insoumise », alors qu’elle flirte avec l’islamisme, parfois radical, et que le mot islam signifie justement « soumission » ! Cette remarque préambulaire étant décochée, passons au vif du sujet. C’est le 25 août 2024 dans la Drôme que l’individu sus-cité a donc dérapé comme un skieur malhabile sur une piste verte du Mont Lozère, provoquant l’irréparable outrage. Ses propos étaient :

« La Martinique, lieu assez spécial et tout petit endroit. Malgré tout, ils sont 300 000, et pardon pour les autres, les Guadeloupéens, et ils ont toujours cultivé un certain sentiment d’élite intellectuelle. La vérité c’est qu’ils le sont quand vous faites à la fois Frantz Fanon, Cézaire, Glissant et Chamoiseau, vous ne pouvez pas dire, on est n’importe où. En Lozère, vous n’avez pas ça, vous avez juste qu’à vous en rendre compte ».
Quelques membre des élites lozériennes au cours des ages

En résumé, il n’y a pas d’élite intellectuelle en Lozère. De la part de quelqu’un qui est tout sauf un imbécile, c’est violent. Car le personnage, s’il est coutumier des outrances verbales et d’une exubérance de tous les instants, n’en est pas moins cultivé, intelligent et donc à ce titre dangereux. Car ces propos mettant stupidement en opposition nos compatriotes insulaires et notre peuple des hautes terres languedociennes et auvergnates pourraient bien illustrer sa vision bien ancrée de la nouvelle population dont il rêve et qu’il appelle sa société créole. Il parle de plus en plus souvent de cette société idéale selon lui, créolisée, métissée, colorisée, autrement dit, débarrassée de sa blanchité. Il l’a clairement exprimé en juin 2024 :

« Quand je suis né, un Français sur dix avait un grand-parent étranger, dorénavant, c’est un sur quatre. Par conséquent, ceux qui s'appellent Français de souche posent un problème sérieux à la cohésion de la société » (1).
Difficile d’être plus clair dans ce sombre exposé, au sens figuré du moins.

A la lueur de ces arguments qui empestent les pires remugles inhérents aux théories décoloniales, postcoloniales et wokistes en vogue dans cette famille politique, l’attaque contre les Lozériens prend une autre dimension. L’inconscient ou le subconscient de notre détracteur ne lui fournissent-ils pas l’image de ce qu’il abhorre le plus, augmentée par les clichés récurrents quant à notre « enclavement » et au « désert français » ? Une population vivant dans le département le moins peuplé de France, isolée par des frontières naturelles, privée de grandes voies de communication et donc peu ouvert sur le monde et qui souffrirait d’un manque d’apports extérieurs, vieillissante, prisonnière de ses vallées, ravagée par le crétinisme des Cévennes, version massive et centrale du crétinisme des Alpes, par la consanguinité et sclérosée faute d’une immigration massive ? Auquel cas, nous sommes pour le héraut de cette nouvelle France de vulgaires souchiens (2), de véritables Cathares, des hérétiques dont il faut se débarrasser, des empêcheurs de créoliser en rond qu’il faut rassembler dans le château du Tournel, le Montségur lozérien, avant que notre Simon de Montfort contemporain, quand il ne se prend pas pour Robespierre, n’y boute le feu après cette stigmatisation en règle (3).

Crétins des Alpes

Vu comme cela, ça fait froid dans le dos ! Attention donc à ne voir qu’un seul trait d’humour maladroit, une formule malheureuse dans une logorrhée qui en dit peut-être plus qu’une simple boutade. Boutade qui n’est d’ailleurs pas montée au nez des spectateurs partisans drômois de l’orateur qui ont complaisamment rigolé. Comme quoi, aux paroles déplacées d’un chameau, la Drôme adhère.

Il y a une autre piste qu’on ne peut écarter. Le fait qu’éventuellement il ne s’agisse que d’une diminution significative de neurones, d’un vieillissement prématuré des fonctions cérébrales, d’une parcheminisation des zones pariétales dédiée à l’intellect, de leur asséchement et de leur jaunissement, auquel cas il faut aliter ce jauni sans tarder dans un établissement spécialisé. Mais cette hypothèse ne peut être validée que par la trépanation de la créature, ce qu’elle risque de refuser. Cette prévisible décision négative va malheureusement à l’encontre de sa santé et de son bien-être et de l’apaisement de la polémique. Les Lozériens ne sont prêts d'oublier ces propos diffamatoires et discriminatoires. Ils ne se mettront pas à boire pour noyer leur chagrin, ils ne vont pas s'emboire de gras pour que la bave du crapaud séditieux n'atteigne leur blanche aplombe (4) ni croire à un éventuel repenti du hâbleur, voire à des excuses. La vengeance étant un plat qui se mange froid, ils ont déjà mis au feu les fers qui marqueront le nigaud d'infamie s'il venait à pointer le bout de son nez ou de tout autre appendice en terre gabale.

A moins qu'ils ne serrent les rangs autour de Talleyrand qui déclarait justement : " Tout ce qui est excessif est insignifiant ".


Lozérix, régleur de compte à KO Janluc

Crane trépané du dolmen de Chapieu (Mende - Lozère)
5000 ans av. JC - Collection du musée du Gévaudan
Les lozériens pratiquent depuis la nuit des temps
cet acte neurochirurgical délicat,témoignant d'un très grand savoir-faire
visant à soulager le patient de maux divers et de vilains mots




(1) https://www.tiktok.com/@ngomajosly/video/7380598340733504800. Déclaration complétée le 7 septembre 2024 lors d'une manifestation par : " Il faut mobiliser la jeunesse et les quartiers populaires. Tout le reste, on perd notre temps." TMC 07/09/2024. On mesure bien l'étendue du mépris pour la ruralité au sens large.
(2) Nom commun. (Néologisme) (Politique) (Péjoratif) Français de souche. Voir en ligne.
(3) Depuis, d'autres délit de faciès ont été révélés. Ainsi les habitants d'Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais) "qui transpirent l'alcool dès le matin, sentent mauvais, sont presque tous obèses" Source : François Ruffin, Ma France en entier, pas à moitié, éditions Les Liens qui libèrent, septembre 2024
(4) Audace, hardiesse effrontée, culot, stabilité contrôlée (dictionnaire de scrabble) 

 

Lecture complémentaire : Pas d’intellectuels en Lozère ? L'inculture de Jean-Luc Mélenchon
Jean-Paul Pelras, Le Point, 07/09/2024 à 11h00, mis à jour le 08/09/2024 à 09h40

samedi 13 juillet 2024

Des céphalopodes enquêtent en Lozère

 

Ô poulpe, au regard de soie ! toi, dont l'âme est inséparable de la mienne ; toi, le plus beau des habitants du globe terrestre, et qui commandes à un sérail de quatre cents ventouses ; toi, en qui siègent noblement, comme dans leur résidence naturelle, par un commun accord, d'un lien indestructible, la douce vertu communicative et les grâces divines, pourquoi n'es-tu pas avec moi, ton ventre de mercure contre ma poitrine d'aluminium, assis tous les deux sur quelque rocher du rivage, pour contempler ce spectacle que j'adore !
Comte de Lautréamont, Les chants de Maldoror

Les cols des Amériques
Thomas Cantaloube

La fille du Poulpe
éditions Moby Dick, 06-2024


Présentation de l'éditeur
Gabriella n'a pas grandi dans une prison bolivienne sans avoir développé un second sens pour les coups bas. Lorsque la jeune femme apprend la chute mystérieuse et fatale d'un journaliste chilien dans les Cévennes, elle décide d'aller y voir de plus près. Elle s'en va explorer les Causses où elle est accueillie par des flics tordus, des gros bras armés et un vieillard crépusculaire en fauteuil roulant. Bien entendu, Gabriel Lecouvreur, alias Le Poulpe, a tenu à la rejoindre pour la protéger. Comme si elle en avait besoin...
La fille du poulpe est une héroïne contemporaine, engagée, curieuse et amoureuse, qui a eu 24 ans en 2024. Ce qu'elle cherche, c'est dénicher au plus profond le désespoir et les injustices pour essayer de les gommer et faire sourire le quotidien. Comme le poulpe, elle s'exprime à travers de petits ou grands faits de société, qui, tels une pathologie, gangrènent le monde. Elle n'est ni flic, ni gendarme, ni femme de loi, elle est la preuve d'un monde à la dérive où elle va mener ses enquêtes guidée par son instinct.

Sous sa forme habituelle, le poulpe se rencontre très rarement en Lozère
son habitat et environnement étant exclusivement maritime.


Mon avis
Suite des tribulations du Poulpe, Gabriel Lecouvreur, à travers sa fille spirituelle, Gabriella, native de Bolivie. L'esprit libertaire qui animait le Poulpe souffle toujours sur ces pages, mais il s'est radicalisé à travers cette jeune métisse féministe, woke et partisane des gauches les plus extrêmes. C'est parfois un peu lourdingue. Si le Poulpe père était un esprit libre et un homme libre, Gabriella est quelque part prisonnière de ses engagements, de ses idéologies, de ses clichés et de ses poncifs. Si leur combat est le même, les arguments et ressources du Poulpe étaient plus originaux et plus convaincants. En plus, cette jeune fille ne boit pas de bière, adieu donc les découvertes de liquides pétillants et peu alcoolisés à base de houblon.

Des boissons que ne consomme pas Gabriella et dont le livre ne parle pas
Dommage !

L'auteur a toutefois l’honnêteté de reconnaître ici et la les limites des choix politiques et sociétaux de son héroïne. Qui dit stricte égalité des genres, dit fin de la galanterie. Gabriella se trimbale donc son sac à dos sans l'aide d’aucun mâle. Le titre fait référence à la sinistre École des Amériques (1), école militaire et policière de contre-guerrilla. Sauf qu'aujourd'hui, ce sont des militaires vénézuéliens chavistes, des militaires nicaraguayens "sandinistes" et autres dérivés des dictatures d’extrême-gauche qui y ont été formés qui mettent ces préceptes en œuvre au mépris des plus élémentaires droits de l'homme

Côté décor, nous sommes en Lozère, entre Mende, le causse de Sauveterre et le Mont Lozère. Les lozériens s'y retrouveront. On passe sur le parvis de la cathédrale de Mende et probablement au bar le Drakkar, à Hyper U, on monte vers Champerboux ou Le Bleymard, on longe le Lot ou le Tarn. Par contre, la description d'une manifestation rassemblant plusieurs milliers de personnes, qui va dégénérer et induire l'intervention musclée de gardes-mobiles et de canons à eau fera sourire les indigènes. Le record d'une manif en Lozère est de 2000 personnes grand maximum, et il n'y a jamais eu de débordements ayant entrainé une riposte policière et le déploiement d'un canon à eau (2). L'un des personnages clé est le préfet de Lozère qui a été placardisé dans la préfecture lozérienne, source de son amertume et par conséquence de sa participation aux agissements vengeurs dénoncés par Gabriella. Cette dernière recevra l'appui d'un berger des causses équipé comme un geek pour veiller sur son troupeau d'ovins menacé par le loup, et d'un néo-rural ex-grand reporter monté sur les hauteurs du Lozère pour y retrouver le calme et la sérénité. Le titre ne fait référence à aucun col cévenol, c'est un jeu de mot qui sert de titre, exercice imposé par la série.

Quant à l'histoire, elle est bien menée, ça se lit vite, le style est agréable, les personnages bien façonnés mais dans une intrigue très manichéenne.

 Lozérix, les lettres perçantes

Troupeau de moutons sur le causse
Source : département de la Lozère
(https://lozere.fr/la-reconquete-ovine-en-lozere.html)


(1) En savoir plus sur L’École des Amériques (Cairn.info).
(2) Je tiens d'une source policière mendoise le fait que le commissariat de Mende ne dispose pas de canon à eau, et que jamais des CRS ou des gardes-mobiles venus ponctuellement en renfort n'en ont amenés.

jeudi 6 juin 2024

Le débarquement des cornes flasques

 

Les cornes, c’est comme les dents. Quand elles poussent, ça fait très mal ; mais une fois poussées, on mange avec.
Anne-Marie Bigot de Cornuel



 

La Lozère est un terroir gourmand. La liste des mets que l’on peut y déguster est fort longue. Il y a néanmoins un produit oublié dont il est légitime de rappeler l’existence.

 Pendant les noires années de l’occupation, même à la campagne on manquait de tout. Notamment de bon pain pour faire les tartines à tremper dans le café matinal. En 1944, les ersatz de farine et autres poudres de berlinpinpin ne convenaient à personne. Jusqu’au jour ou un agriculteur établi dans la région de Vitrolles, commune de Rieutort-de-Randon, eu l’idée de râper les cornes de ses vaches et de faire ensuite longuement bouillir les copeaux obtenus afin de les ramollir. Il les laissa ensuite sécher, avant de les refaire gonfler un bol de lait. 

Il tentât la première dégustation le 6 juin et fut immédiatement convaincu par sa préparation. De la pénurie de pain étaient nées les cornes flasques pour la collation matinale. Celles-ci allaient rapidement débarquer sur toutes les tables du petit déjeuner. Après avoir pris le taureau par les cornes, on allait prendre les cornes avec une petite cuillère.

Quant au pope corne, il sera inventé un peu plus tard par un moine grec orthodoxe. Et c'est en 1953 que la recette à base de riz soufflé du compagnon de Séoul, l'ami riz-corée, viendra concurrencer les cornes flasques.

Lozérix, encornet farceur


Les vikings ont eux aussi utilisé des cornes-flasques
mais comme récipient


mardi 28 mai 2024

Peut-on être un winner en Lozère ?

Mon Lapin Quotidien n°29
Ouvrage collectif
design de Quentin Faucompré
éditions L’Association, 05-2024

 

Présentation de l'éditeur

Mon Lapin Quotidien n°29 – Le poil soyeux, les pattes arrière montées sur ressort, un joli maillot rouge et vert près du corps, Mon Lapin Quotidien #29 pète la forme. Possiblement olympique, la forme, mais aussi Oulipique (dixit Hervé Le Tellier). Un numéro plutôt “sport” donc. MLQ #29 quadrille le terrain : hygiène de vie, dieux du stade, adrénaline, opium du peuple, culte du corps, compétitions, lutte des classes, courbatures, haut du podium, transfert du mercato, tout y passe. Bien échauffé, MLQ vous embarque au beau milieu d’improbables terrains de jeux graphiques et littéraires, tout en n’hésitant pas à faire des détours vers quelques vestiaires-coulisses existentiels.

MLQ évoque pêle-mêle Javier Milei, le 100 mètres saut du lit, Amélie Oudéa-Castéra, le lancer de marteau et faucille, la musique sportive, la cérémonie de la laisse, Leni Riefenstahl, le surf hippique, Raymond Poulidor, le water baseball, etc., etc.

L’équipe d’athlètes habituelle fusionne avec quelques nouvelles têtes.
Parmi elles : Rémy Cattelain, Cécile Dazord, Christophe Giudicelli, Lucile Gautier, Pauline Lecerf, Éric Lambé, Joseph Levacher, et Sébastien Lumineau.

Informations :
Nombre de pages : 12 p.
ISBN : 9782844149633
Prix : 8€

Présentation sur le site de l'éditeur
Présentation sur le site Librairie sans titre, avec quelques pages accessibles

Ce n'est pas dit dans la présentation, mais vu le titre, on peut supposer que la Lozère est aussi l'un des sujets abordés, sous l'angle sportif à priori. En tous cas, Lozère rime mieux avec winner qu'avec looser !

Mon Lapin Quotidien, ou MLQ est un trimestriel humouristique de L'Association, dont le premier numéro est paru en , un journal qui sort tous les 3 mois, de 12 à 16 pages en noir & blanc et très grand format. Les fondateurs sont Killoffer et Jean-Yves Duhoo qui en sont également les rédacteurs en chef jusqu’en 2019, puis Quentin Faucompré rejoint Patrice Killoffer en 2020 qui le laisse seul aux manettes dès la fin de l'année suivante. Le journal est mis en page par le graphiste et illustrateur Rocco. (source : Wikipedia)

Quelques données (sérieuses) pour compléter :
Le département  de la Lozère est l'un des plus sportifs de France et compte de nombreux clubs et comités départementaux sportifs (en pourcentage il se classe dans le peloton de tête du ratio nombre de clubs sportifs par rapport à la population).

  • 1 habitant sur 3 est adhérent à une fédération sportive.
  • 445 clubs sportifs agréés et 43 comités.
  • 24 000 : nombre de licenciés en 2011 (toutes disciplines confondues)

La Lozère bénéficie du plus fort taux d'équipement du Languedoc-Roussillon. Les clubs sont les partenaires incontournables des politiques locales d’animation, de promotion et d’éducation sportive. Mende, la préfecture, a été élue par deux fois ville la plus sportive de France.

La Lozère, terre d'événements sportifs :

(source : site du Département de la Lozère)

Quelques sportifs lozériens célèbres :

  • Lucien Mias, deuxième ligne de l'équipe de France de Rugby, 29 sélections.
  • Marion Buisson, championne de France de saut à la perche 2008
  • Romain Paulhan champion de France de VTT Descente DH.
  • David Pigeyre, équipe de France de canoë-kayak, top 20 mondial, kayak freestyle.
  • Éric Rousset, champion de France de rallye terre.
  • Axel Roudil-Cortinat, champion de France de cross-country marathon 2021, 2023.
  • Le Mende Volley Lozère (MVL) évolue en ligue B du championnat de France (champion de France N2 en 2016.
  • Isabelle Lafaye Marziou, multi-médaillée en tennis de table paralympique, simple et double, entre 1996 et 2017. Née à St Jean du Gard en 1963, Isabelle Lafaye a fait toute sa scolarité, primaire et secondaire à Mende où elle a vécu jusqu'en 1982. Son palmarès sur le site du comité paralympique.

Pour finir, une anecdote tennistique et personnelle.
Entre 1975 et 1994, j'ai eu une carrière tennistique significative. Classé 30/2 à 18 ans, les aléas de la vie ne m'ont pas permis de poursuivre une progression, et au contraire, faute de compétition et de pratique je me suis rapidement retrouvé à 0/40. Mes participations tardives à quelques tournois en simple et en double n'ont pas été couronnées de succès. J'en suis donc resté au tennis loisir. Mais durant mes années de minime/cadet/junior, jouant dans l'équipe de Mende, nous avons avec mes camarades et complices connus quelques victoires. Notamment en 1979 quand notre équipe cadets 2e année, - composée de trois garçons Philippe, François, Jean-Michel et une fille, Maryline -, nous sommes sortis premiers de la phase départementale lozérienne. Les autres rencontres étaient programmées contre des équipes de l'Hérault. Contre l'ASPTT Montpellier, nous avons gagné 4 jeux en 4 matches. Alors que les héraultais étaient tous à 30, 15/5 voire 15/4, aucun de nous n'était encore classé. Le déplacement suivant était prévu contre le Tennis Club de Lunel. Manque de bol, la veille de la rencontre la Lozère a subi d'importante chutes de neige. Notre équipe a du déclarer forfait. Comme je jouais en n°1, j'aurais du affronter le n°1 lunellois qui n'était autre que Thierry Champion, qui était déjà surclassé au dessus de sa catégorie.
Grace à cet évènement neigeux, la seule victoire dont Thierry Champion peut se prévaloir contre moi, est une victoire par forfait climatique !

En me remémorant cette époque, j'ai une pensée reconnaissante pour M. François Tricot qui a été un des fondateurs du Tennis Club de Mende et son président pendant plusieurs années. Il a beaucoup fait pour que les jeunes accèdent au tennis dans ces années ou la "démocratisation" de ce sport était le maitre-mot. Il était toujours disponible pour encadrer les déplacements, organiser les entrainements, favoriser la diffusion du tennis dans tous les milieux et offrir des tournées de bières au bar du Commerce. Célèbre aussi pour sa coupe de cheveux style gazon de Wimbledon en fin de tournoi, ce fier normand natif de Bois-Guillaume était d'une grande générosité. La liste des jeunes mendois, filles et garçons, qui ont pu frapper leurs premières balles puis jouer leurs premiers tournois dans toute la Lozère et quelques fois plus loin, grâce à lui, est bien longue. Membre des instances départementales et régionales de la FFT, une coupe inter-clubs portant son nom a été jouée durant quelques années.

Lozérix, crocodile de fond de court

 

La raquette Adidas Ilie Nastase que j'utilisais à l'époque



mardi 23 avril 2024

Le quanton de Malbouzon

Peter Higgs, 1929 - 2024
prix Nobel de physique 2013

 
Quatre-vingt-dix-huit pour cent de la matière qui existe aujourd'hui s'est formé à partir de l'éruption d'énergie du Big-Bang. Cela signifie que presque tous les atomes présents dans notre corps sont déjà passés par diverses étoiles et ont déjà occupé des milliards d'organismes différents avant d'arriver jusqu'à nous.

Parfois, je pense que la vie n'a aucune valeur, que c'est une chose insignifiante. Je vais mourir et l'humanité ne sentira pas la différence. L'humanité va mourir et l'éternité ne sentira pas la différence. Nous ne sommes que des ombres, de vaines poussières se perdant dans le temps ... Mais, d'autres fois, je pense que nous naissons tous avec une mission, que nous jouons tous un rôle, que nous faisons tous partie d'un système. Cela peut être un rôle minuscule, une mission dérisoire, cela peut même nous paraître une vie perdue, mais, après tout, qui peut savoir si une chose aussi infime n'est pas une part essentielle dans la conception du grand gâteau cosmique ?... Nous sommes de minuscules papillons dont le fragile battement d'ailes a peut-être l'étrange pouvoir de générer de lointaines tempêtes dans l'univers.

José Rodrigues dos Santos, La formule de Dieu

 
Le quanton est un objet dont le comportement est décrit par la théorie quantique. 

Malbouzon (48270) est une commune de Lozère. Elle fait aujourd’hui partie de la commune nouvelle de Malbouzon-Prinsuéjols (48100), sur l’Aubrac lozérien. Le nom de ce village vient de Maleboson. L’origine en serait la chute d’une météorite en 1649, chargée en particules élémentaires dont le fameux boson, identifié plus tard comme boson de Higgs. Ce phénomène a eu lieu alors qu'un orage d'une violence rare ce déchainait sur les lieux ce qui en fait la première projection d'un quanton sous la pluie (1). Ce boson permet d'expliquer la brisure de l'interaction unifiée électrofaible en deux interactions par l'intermédiaire du mécanisme de Brout-Englert-Higgs-Hagen-Guralnik-Kibble et d'expliquer ainsi pourquoi certaines particules ont une masse et d'autres n'en ont pas. Son existence a été confirmée de manière expérimentale en 2012 grâce à l'utilisation du LHC et a conduit à l'attribution du prix Nobel de physique à François Englert et Peter Higgs en 2013.

La grande utilité du boson de Higgs

La collision du corps astral contre la croûte terrestre fit le buzz à l'époque, d'autant qu'en éclaboussant de matériaux incandescents toute la zone d'impact, un incendie se propagea à la faveur d'une forte bise aux bosquets environnants, incendie heureusement sans gravité à cause du temps pluvieux. C'est un ancien bosco qui avait quitté son Gévaudan natal et la condition de bouseux qui lui était promise mais qu'il évita en s'engageant dans la marine, qui trouva les restes éparpillés façon puzzle du météoroïde. Manque de pot, les bosons déposés par la météorite étaient avariés, leur masse leur conférant des propriétés différentes de celles du boson classique, celui de l'interaction électromagnétique, le photon. On a donc parlé de mal boson, dans le sens de mauvais boson, nom qui restera accroché au point de chute de la météorite dans le canton de Malbouzon, le mont Bosonis, qui deviendra par la suite le Mas de Boson, Malboson et enfin Malbouzon en occitan. Il est probable qu’au dernier moment de sa chute la météorite se soit fragmentée en deux ou trois parties puisqu’on trouve à proximité de Nasbinals (48260) le lieu-dit Bouzon ou Bouson. Au lieu-dit Les Salces, à proximité de Recoules d'Aubrac (48260), le savant physicien écossais Ian Fleming a étudié un autre fragment stellaire possiblement issu de la même météorite. Il lui a consacré un mémoire scientifique intitulé Quanton of Salces (2).

Le point de chute de la météorite
Mont Bosonis, aujourd'hui Truc de Coucuts

L’anomalie de ce boson tombé en Lozère est regrettable car saine, cette particule élémentaire constitue l'une des clefs de voûte du modèle standard de la physique des particules. La connaissance de ses caractéristiques peut par ailleurs orienter la recherche au-delà du modèle standard et ouvrir la voie à la découverte d'une nouvelle physique, telle que la supersymétrie ou la matière noire. La Lozère aurait ainsi pu être ainsi reconnue grâce à la physique quantique et le candide canton de Malbouzon aurait gagné en postérité alors que le qu'en dira t'on le confine à une célébrité fantôme. Le sol bousillé et bosselé par ces briques élémentaires en divagation orbitale, tous ces électrons, protons, neutrons ne furent point positifs pour la réputation du village. A ce petit jeu de la réputation et à une lettre près, les bisons basés à Sainte-Eulalie en Margeride sont de meilleures trompettes de la renommée que les bizarres bosons biaisés de Malbouzon sans propriété particulière, juste de pauvres atomes dénoyautés comme de vulgaires olives. Ce n'était en somme que des particules secondaires que les mathématiciens n'évoquent même pas en cours élémentaire, contrairement au boson de Higgs qui a une carrière au long cours. Ce besogneux de la physique étant partie prenante dans l'édification des masses qui sans lui seraient laborieuses.

Le mécanisme de Higgs,
un exemple de brisure spontanée de symétrie selon la symétrie axiale du chapeau mexicain.
Diagramme vectoriel à usage éducatif et scientifique


L'histoire aurait été différente si l'espace, à l'occasion de cet accident de trafic inter-planétaire, avait laissé choir un boson futé. On se consolera, de manière très relative, avec la mention qui fut faite du petit village d’Aubrac lors d'une émission humoristique en 2015. L'étrangeté du nom de Malbouzon n'a pas échappé à un artiste comique franco-marocain qui, lors d'une représentation du Jamel Comedy Club (3)  à laquelle assistait un spectateur malbouzonois, a interpellé ce dernier comme une " racaille de la campagne ". Il aurait été plus juste de parler de quantique de la racaille (4). Toujours est-il que ce  baston sidéral et son boson fumeux ont semé un fameux bazar, un boson lunatique qui n'a pas fait monter la Lozère au septième ciel.

Lozérix, atome crochu et aligoté


(1) Ce quanton sous la pluie sera popularisé bien plus tard par le film étasunien "Singin' in the Rain", film musical réalisé par Stanley Donen et Gene Kelly, sorti en 1952.
(2) Un documentaire scientifique sera réalisé en 2008 par Marc Foster avec Daniel Craig dans le rôle du savant.

(3) Voir la vidéo sur Facebook : https://www.facebook.com/WalyDiaFB/videos/vb.169862493026927/1063685040311330/?type=2&theater
(4) Roman de Vincent Ravalec, publié en 2006 qui évoque La génération d' un monde sans pitié, dans cet univers fait de désillusions mais aussi d'ironie et d'un bon paquet d'espoirs, de combines foireuses et de besoin d'amour. Losers nés ou simplement victimes de concours de circonstances, les personnages qui hantent les pages de « Cantique de la racaille » ne croient plus en grand-chose, et pourtant, il ne leur faut pas non plus grand-chose pour repartir au quart de tour : une fille qui passe, une mélodie bien balancée ou simplement un tuyau moins percé que les autres.