Photo Midi-Libre |
" La roue de la fortune tourne plus vite que les pales du moulin "
Miguel de Cervantés
Il est régulièrement question dans le quotidien régional Midi-libre, de projets d’installation de parcs éoliens, (Margeride, Pelouse, Le Born, Saint Sauveur de Peyre…) les derniers en date sur la terre de Peyre ou sur le Truc de l’Homme ou sept éoliennes sont envisagées. En Aubrac, l’aligot a déjà le vent en poupe. Grâce à cette technologie moderne, il sera encore plus dans le vent. Dans Lozère il y a « ère », voici donc le département transformable en chambre à air. Normal quand on a eu pendant plusieurs années le slogan soufflé du Conseil général : Lozère tu m’aères. Les édiles soulevant ces questions considèrent que la Lozère est une île sous le vent. Les vaches d’Aubrac sont souvent coiffées en coup de vent, phénomène atmosphérique pouvant même décorner les bœufs. Certains voient cette implantation comme une bouffée d’oxygène, économique notamment, un souffle nouveau sur la Lozère, semant aux vents les retombées financières de l’électricité ventilée, une ventouse posée sur le département qu’on dit malade de son enclavement. Utiliser la brise pourrait éviter d’être pris au dépourvu quand la bise sera venue.
D’autres dressent un éventaire dans lequel ils disposent leurs oppositions. Ils susurrent que le bruit d’hélice, hélas, est l’os. Sinon, qui s’émouvrait de voir hélice au pays des merveilles, même si sept éoliennes n’ont rien à voir avec les huit scaroles. Et la défiguration du paysage ! Une éolienne sur l’Aubrac c’est comme un harpon dans l’évent d’une baleine. Il y a fort à parier qu’une tempête se lèvera entre partisans et adversaires de ces moulins à vent des temps modernes. Personne ne restera les pieds en éventails. Le vent au dehors sera source de rage dedans. Les nouveaux Don Quichotte vont charger au cri de « Ô vent, suspend ces tôles ». Ce sera la crème des bris d’hélices. Une jacquerie est prévisible, et on sait combien les actions des Jacques-l’éventeur sont radicales.
C'est alors que Don Quichotte dit à Sancho Pança : " Regarde, voila devant nous trente géants démesurés auxquels je pense livrer bataille ..." |
Les autres, notamment des dames bien mises qui sous l’auvent suspendent leur étole, soutiendront que pour une fois que le vent tourne en faveur de la Lozère, il ne faudrait pas crever ce ballon d’assistance respiratoire. Faut-il brasser autant d’air sur cette affaire ? Techniquement, une éolienne n’est jamais qu’un gros ventilateur, sauf que les pales du ventilateur propulsent l’air, alors que c’est l’air qui propulse les pales de l’éolienne. Dans ce mouvement véridique, la pale hisse pistons et turbines des générateurs, transformant le courant d’air en courant électrique.
Photo Collectif Terre de Peyre |
L’opposition à la nouveauté est un courant continu dans le paysage socioculturel et politique, contre lequel les alternatifs ont bien du mal à se faire entendre. Il est par exemple reproché à l’exploitant de faire du bénéfice sur la vente d’électricité au mépris de l’environnement, car ne se limitant pas à alimenter un secteur proche. Dans ce cas, le surplus de courant, le vend il à tort ? Autant en exporte le vent souffleront les libéraux. Le vent n’est pas une marchandise, s’époumoneront les alters-citoyens. Pour être objectif, faisons remarquer qu’une éolienne n’est pas plus moche qu’une ligne à Très-Haute-Tension, dont les laids hauts liens volent au vent et pendent comme des lianes au-dessus des paysages. Lianes qui n’ont rien de bucolique, car on n’y voit ni Tarzan ni singe, si ce n'est des riverains transformés en lémurs de lamentation. Les volts vrombissent de transports d’électrons qui s’entrechoquent en une orgie si intense, qu’on ne sait plus quel ohm est le fils d’ampère. Et car les volts errent, mœurs révoltantes, on ne peut avoir en eux une confiance absolue. Souvenez-vous de la grande panne électrique de l’Italie, plongée dans le noir et qui ampère son latin. Par rapport au nucléaire, on conviendra aussi que les tours de bise sont moins dangereuses que les cheminées de centrales atomiques.
Photo Midi-Libre |
La Lozère est ouverte aux quatre vents, le nier serait lutter contre vents et marées. Vers qui penchera t-elle ? Vers ceux rêvant à de nouveaux hauts de hurlevent ou vers les défenseurs des engoulevents dont on craint qu’ils soient broyés par les moulinettes géantes. Du levant au ponant du Gévaudan, ça va décoiffer, il y aura du vent dans les poils. Moulins à paroles et brise de maux s’accorderont-ils sur le vent nouveau ?
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