vendredi 2 janvier 2015

Janvier, temps des prédictions zodiacales




Il y a douze mois et douze signes ; l’avant-dernier, le Sagittaire, décoche sa flèche armée d’un dard.
Les douze signes sont en guerre. La belle vache, la vache noire à l’étoile blanche au front, sort de la forêt des dépouilles.
Dans la poitrine le dard de la flèche ; son sang coule ; elle beugle, tête levée.
La trombe sonne : feu et tonnerre ; pluie et vent; tonnerre et feu ; rien ; plus rien ; rien, ni série ! 
Théodore Hersart de La Villemarqué, Ar rannoù - Barzaz Breiz


Janvier est le mois des doutes, des inquiétudes, des espérances et de leurs corollaires : les prédictions astrologiques ou désastrologiques. Nos Nostradamus contemporains s’en donnent à cœur joie. Personnellement, Nostradam’use mais ne m’amuse pas. Tel Prolix le devin (1), le prédicateur déclame ses inepties avec la complicité des cornes de brume médiatiques. La aussi, ces cornes m’usent. Hormis l’influence du soleil sur le jour et la nuit, des phases de la lune sur la poussée des champignons et sur l’humeur des loups-garous, les élucubrations zodiaco-divino-planétaires me causent un érythème astral. Je vais vous remémorer une histoire vielle de plusieurs milliers d’années, qui montre, combien loin d’être aussi superstitieux qu’on le dit parfois, nos ascendants n’avait pas la tête dans les étoiles mais bien les pieds sur terre.

Faisons un petit retour en arrière dans la préhistoire lozérienne. Nous sommes il y a fort longtemps, 7000 ans environ, quand nos ancêtres dressent les menhirs de la Cham des Bondons, guidés par leur chaman entré en transe en fumant du foin de cardabelle (2), ce qui lui provoquera peu après une gastro, logique, la cardabelle n’étant pas comestible. Ils balancent (19 sept – 20 oct) leurs blocs de granite suivant la disposition du système planétaire Béta du Cyclope, constellation gravitant autour d’Alpha du Centaure. Ils espèrent, par cet hommage, infléchir la colère d’un Dieu qui les tourmente, leur plus puissante divinité, le très cruel Crom-Cruach (3), le ver géant qui aspire toute vie. Ce ver sot (20 janv – 18 fev) ne cesse de faire pleuvoir des météorites sur leur territoire. Malgré leur lithique dévotion, les jets maux (19 mai – 20 juin) se poursuivent.

Cardabelle
Devant l’inefficacité de leur action, ils réorganisent les menhirs en se calquant alors sur la constellation d’Omega de l’Amarine (4). Vexé, Crom-Cruach déclenche un imprévisible désastre au logis. Deux comètes gigantesques (5) tombent sur la région, anéantissant quasiment toute cette civilisation astropithèque, en une farce cosmique absolument pas rigolote. Nos bâtisseurs de mégalithes se dirent finalement que leur avenir ne dépend guère des étoiles, mais aussi qu’un retour de jet d’ail vengeur contre Crom le vampire s’avère délicat. Ils décident de changer leurs croyances d’épaule, et de ne plus écouter l’épître de leur apôtre sorcier, piètre astrologue et prêtre pitre.

Menhir et Puech des Bondons à l'arrière plan
 
Disposant de peu de bêtes de somme, ils firent un attelage d’un cheval bai, lié (21 mars – 20 avr) à un taureau (21 avr – 20 mai) qui a pris cornes (23 dec – 19 janv), pour déplacer une dernière fois leurs menhirs. Comme leurs poids sonnent (19 fev – 20 mars) le couple moteur, ils se servent aussi de rondins de bois sur lesquels ils couchent les menhirs. Sur ce lit on (23 juil – 21 aout) peut déplacer d’importantes charges. Ils s’agitèrent (21 nov – 22 dec) pour laisser leur religion vierge (22 août – 22 sept) de toute trace d’inspiration spatiale, sauf un unique menhir, le dernier du culte, qu’enserre (21 juin – 22 juil) un cromlech de pierres dressées (6).

Suite à cette triste expérience, la tradition gabale puis lozérienne veut que les membres de notre clan évitent de se comporter comme des moutons de Panurge ou des agneaux de Saturne. Saturne, faut-il le rappeler, qui avait la fâcheuse habitude de dévorer ses enfants. La seule étoile de référence, c’est Vénus, qui permet au berger de se guider à la tombée de la nuit et au lever de la lune, pour qu’il dorme et que son corps pionce (21 oct – 20 nov) du sommeil du juste au fond de sa caselle, capitelle, cadole, baraque ou borie. Remarquons pour finir que chez nos voisins d’Aveyron, les bergers se guident avec la Vénus de Millau.


(1) Voir Le Devin, dix-neuvième album de la série Astérix, René Goscinny (scénario) Albert Uderzo (dessin), éditions Dargaud, 1972.
(2) Cardabelle ou Carline à feuilles d'acanthe (Carlina acanthifolia)
(3) Crom-Cruach, mythologie pré-celtique et celtique, puissance des ténèbres d’allure monstrueuse, représentée par un ver ou un dragon. Ceux qui l’invoquent paient ses services de leur raison puis leur vie. Son sanctuaire à Mag Slecht (Irlande) est une idole entourée de 12 pierres levées.
(4) Amarine, autre nom du saule des vanniers.
(5) Allegre et Mariette, les deux mamelons (puech en occitan)  des Bondons, sont les traces de ce cataclysme. Site sur les mégalithes de la Cham des Bondons.
(6) Cromlech, cercle de pierres. Celui en question est visible sur l’Aire des Trois Seigneurs, entre La Rouvière et Champerboux sur le causse de Sauveterre.
 

Lozérix – Lycanthrope (30 fev – 01 avril) du 1er décan (de la Roche)
 
Puech des Bondons

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