jeudi 1 janvier 2015

La Bête, notre animal totémique

On ne plaisante pas avec la Bête du Gévaudan. Elle est un symbole de notre résistance. Résistance à l'absolutisme de la monarchie lors du règne de Louis XIV. Résistance à l'occupation militaire, elle était bien moins féroce que les dragons traquant les camisards cévenols. Résistance à l'église alliée des puissants, dont le seul but était de maintenir le peuple sous sa coupe par le maintien de l'ignorance et de l'obscurantisme. Résistance à la noblesse de robe, avènement de la médiocrité qui règne encore et toujours. La noblesse ne se gagne qu'à la pointe de l'épée ou se juge à la grandeur de l'âme. Quel dommage que la Bête n'ai pu agir lors de la partition du Gévaudan en 1791, et plus récemment quand la grande guerre a avalé 4 000 de nos hommes, morts sous les obus prussiens dans une guerre saluée par des gouvernements d'opérette, de vils politiciens, des gradés d'occasion et des diplomates de pacotille. Rappelons que la Lozère a perdu 22% de ses fils, contre 15% en moyenne nationale. Déjà se préparait la liquidation des campagnes, de la paysannerie dont le monde moderne n'avait que faire. La Lozère, toutes les contrées rurales et les colonies ont payé des tributs bien plus lourds que les citadins. Quel dommage que la Bête ne soit plus la pour mettre à mal tous ces plans de désenclavement du Massif Central, qui les uns après les autres scellent la désertification de nos contrées. Derniers avatars, des serpents bitumeux qui ne servent qu'à drainer des hordes de hollandais roulants ou ouvrir nos portes aux nouvelles grandes compagnies des périphéries urbaines. Nous sommes fiers de la Bête, comme nous sommes fiers des cévenols, des caussenards, des aubracois et des margeridaïres qui ont modelé le Gévaudan. Le Pays Gabale, même irréel, immatériel ou virtuel n'en est pas moins intemporel et épique, comme Ambor et sa cavalerie à Gergovie, Orélie-Antoine de Tounens roy d'Araucanie ou l'amiral Guepratte maître du Yang Tsé Kiang. Le sang de la Bête coule toujours dans nos veines, il se réchauffe. Bientôt, nous ne nous contenterons pas de parrainer un escorteur d'escadre comme le conseil général depuis 1965*. L'usine de Saint Chély-d'Apcher nous coulera de l’acier pour un cuirassé furtif, notre Potemkine, qui remontera le Lot jusqu'à Mende. Une compagnie de fusiliers-marins de la Marine Gabale hissera sur le foirail, au son des canons rédempteurs notre pavillon bleu blanc vert frappé de quatre hermines. Non, la Bête n'est pas morte. Elle sommeille. Son réveil sera l'aube de notre Grand Soir et le crépuscule des odieux.

Lozérix - Loup sortant de l'ombre et renard du disert.

* : Escorteur d'escadre Du Chayla, parrainé par le Département de la Lozère, désarmé le 15 novembre 1991, coulé en septembre 2001.
Tape de bouche de l'escorteur d'escadre Du Chayla


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